jeudi 3 mai 2012

La fidélité n'est pas le problème

Billet initialement publié le 21 juillet 2006 sur le blog Opinion on TEL (site Kaleidoscope.org)

Juillet 2006, La Grande Motte , les vacances. Enfin, pas tout à fait. Une cinquantaine de chercheurs de toutes disciplines se réunissent pour faire le point sur les progrès de la conception et de l’utilisation de simulations et réalités virtuelles pour l’apprentissage, surtout celui des adultes.

L’intérêt des simulations et des réalités virtuelles pour les apprentissages professionnels n’échappe à personne : disponibilité, accessibilité hors risques, réalisme… ce dernier terme est d’ailleurs celui sur lequel se focalise le plus nettement l’attention. Il en appelle d’autres comme « fidélité » de la simulation à une situation de référence, ou des expressions comme « simulateur pleine échelle ».

La question de la « fidélité » occupe les chercheurs dans le domaine des EIAH depuis les débuts—les années 70. Elle renvoie à la fois à un projet technologique qui intègre informatique et divers secteurs de l’ingénierie pour la réalisation d’espaces physiques permettant de reproduire de façon vivante la situation de référence (cabine de pilotage d’un avion, mannequin d’un patient, etc.), et à un désir d’affranchissement des barrières entre une réalité que l’on invoque et sa représentation. Si les technologies progressent, en revanche la frustration est toujours grande de voir nos désirs d’interchangeabilité du réel et du virtuel nous échapper. La faute en revient probablement à notre ignorance : la fidélité est hors de portée ; les recherches sémiotiques l’on mit en évidence il y a bien longtemps. Rappelons-le ce postulat fondateur : on ne peut confondre le signe et le référent. La question du référent, elle-même, est bien plus difficile qu’il n’y parait au premier coup d’œil : un lion dans une cage n’est plus vraiment un lion. Nous faisons fausse route !

Le problème n’est pas celui de la fidélité, mais celui de l’évaluation de la validité de la simulation au regard de l’objectif d’apprentissage. La conférence d’Anne-Sophie Nyssen fut lors de cette école thématique une excellente introduction à cette problématique, prenant la question du point de vue des bénéfices et des limites du recours aux simulations pleine échelle (dans son cas, pour la formation des anesthésistes). Comment mesurer ou documenter ces limites et ces bénéfices ? Manifestement pas en mesurant, en soi, la distance entre la simulation et son référent, mais la distance entre la compétence ou la connaissance que la simulation permet de construire et celle qui est visée par la situation d’apprentissage. Ce n’est donc plus le dispositif informatique qu’il faut évaluer mais toute la situation d’apprentissage qu’il permet (ou ne permet pas) de mettre en scène. Une voie que Jocelyne et Marc Nanard ouvraient, à Montpellier déjà, en substituant l’idée d’engagement direct à celle de manipulation directe à l’interface d’un logiciel.

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